Un journaliste français aux mains d’un groupe lié à Al-Qaïda
Un journaliste français aux mains d’un groupe lié à Al-Qaïda
Olivier Dubois, journaliste français et collaborateur des médias, a été pris en otage par des terroristes affiliés à Al-Qaïda au Mali début avril. Il a révélé cette information dans une vidéo publiée mercredi sur les réseaux sociaux, qui a conduit à l’ouverture d’une enquête antiterroriste en France.
Olivier Dubois explique dans un enregistrement d’une vingtaine de secondes qu’il a été enlevé le 8 avril à Gao (Nord) par la principale coalition djihadiste du Sahel, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM, ou Jnim en arabe), qui est affilié à Al-Qaïda et dirigé par le chef touareg malien Iyad Ag Ghaly.
Il prétend parler à sa famille, à ses amis et au gouvernement français depuis une tente, les suppliant de « faire tout ce qui est en leur pouvoir pour (le) libérer ».
Selon Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement français à Paris, « je peux confirmer que le journaliste Olivier Dubois a disparu au Mali ».
Selon le parquet national antiterroriste (Pnat), une enquête préliminaire a été ouverte pour « enlèvement en bande organisée » et « en relation avec une entreprise terroriste », ce qui est la procédure habituelle lorsqu’un Français est enlevé à l’étranger.
Les troubles sécuritaires dans la nation sahélienne ont été couverts par Olivier Dubois, un journaliste indépendant de 46 ans qui vit et travaille au Mali depuis 2015 (BIEN 2015), pour divers médias, dont le magazine français Le Point Afrique et, depuis un an, le quotidien français Libération.
Rendez-vous avec un jihadiste
Selon des informations recueillies par l’AFP auprès de divers interlocuteurs militaires et diplomatiques et auprès du « fixateur » d’Olivier Dubois, l’un de ces locaux auxquels les journalistes font régulièrement appel dans les zones à risque pour les aider dans leur travail, celui-ci s’était rendu en autonomie à Gao pour un entretien avec Abdallah Ag Albakaye, commandant d’un groupe GSIM dans la zone de Talataye, à environ 150 km de Gao.
Gao a été rejoint par Olivier Dubois par avion le 8 avril au petit matin. Il a laissé son téléphone et son passeport à l’hôtel où il avait réservé une chambre. Son fixeur a déclaré qu’en se promenant avec lui à Gao, il l’a vu monter dans une voiture avec de nombreux autres hommes.
Depuis, personne n’a revu le journaliste. Lorsqu’il ne s’est pas présenté lors de son voyage de retour à Bamako deux jours plus tard, un avertissement subtil a été émis.
La possibilité d’un ajustement rapide des horaires a été envisagée alors que la nouvelle de son absence était gardée secrète, mais cette attente a diminué de jour en jour jusqu’à ce que la vidéo soit diffusée dans la nuit de mardi à mercredi.
Libération a déclaré sur son site Internet qu’Olivier « se retrouve désormais de l’autre côté du miroir, lui-même captif ».
Selon un expert français de la propagande djihadiste sur Internet, Wareeth al-Qassam, un média qui soutient Al-Qaïda, a mis en ligne le film sans le retirer.
Six otages occidentaux au Sahel
Depuis que Sophie Pétronin, une septuagénaire qui avait également été enlevée en décembre 2016 à Gao, a été libérée en octobre 2020, il n’y avait plus d’otages français nulle part dans le monde. L’homme politique malien Soumala Cissé, décédé depuis, et deux Italiens ont également été libérés en même temps que Mme Pétronin.
Le gouvernement malien n’a jamais vérifié le versement d’une rançon en échange de la libération de 200 détenus, dont certains djihadistes, malgré de fréquentes rumeurs contraires.
Avec l’enlèvement d’Olivier Dubois, ce sont désormais au moins six otages occidentaux qui sont retenus captifs au Sahel. Les autres sont une Allemande au Niger, une religieuse colombienne au Mali, une Roumaine et une Australienne enlevées au Burkina Faso, une Américaine enlevée au Niger et une Roumaine.
Une recrudescence djihadiste du Nord afflige le Mali depuis 2012, plongeant le pays dans une crise sécuritaire qui s’est étendue au centre du pays puis aux pays voisins du Burkina Faso et du Niger.
Malgré la présence des forces onusiennes, françaises et africaines, les violences, qu’elles soient djihadistes, intercommunautaires ou autres, ont fait des milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés.
La « libération immédiate » d’Olivier Dubois a été demandée dans un communiqué conjoint de la Fédération internationale et européenne des journalistes (FIJ-FEJ) et de ses affiliés français, SNJ, SNJ-CGT et CFDT-Journalistes.
Ces syndicats font valoir que les reportages à partir de lieux à risque « reposent principalement sur des journalistes indépendants » qui travaillent pour divers médias et qu’ils « méritent une aide financière, logistique, psychologique et de gestion des risques complète de la part de leurs salles de rédaction ». Les consignes des médias précisent qu’ils doivent « faire tout leur possible » pour obtenir la libération d’Olivier Dubois.